vendredi 8 mai 2015

La mare au diable de George Sand



" Ce livre m'a été inspiré par une gravure d'Holbein, qui m'avait frappé, une scène réelle que j'eus sous les yeux dans le même moment, au temps des semailles, voilà tout ce qui m'a poussé à écrire cette histoire modeste, placée au milieu des humbles paysages que je parcourais chaque jour. J'ai bien vu , j'ai bien senti le beau dans le simple, mais voir et peindre sont deux !Tout ce que l'artiste peut espérer de mieux, c'est d'engager ceux qui ont des yeux à regarder aussi. Voyez donc la simplicité vous autres, voyez le ciel et les champs, et les arbres et les paysans surtout dans ce qu'ils ont de bon et de vrai : " vous les verrez un peu dans mon livre, vous les verrez beaucoup mieux dans la nature."

Germain, lui dit un jour son beau père il faut pourtant te décider à reprendre femme, voilà bien deux ans que tu es veuf de ma fille; tu as trois beaux enfants, ma femme  et ma bru les ont soignés de leur mieux, et les ont aimés comme elles le devaient. Je n'en connais pas dans notre paroisse, Ni moi non plus, mais il y a ailleurs; Vous avez quelqu'un  en vue, mon père, alors dites le moi tout de suite; Oui, j'ai quelqu'un en vue, répondit le père Maurice, c'est une Léonard, veuve d'un Guérin qui demeure à Fourche, elle s'appelle Catherine comme ta défunte, c'est un bon sujet, elle a trente deux ans, elle a huit à dix mille francs de terre. Vous avez donc arrangé tout cela? Oui sauf votre avis à tout les deux. C'est demain samedi que tu feras ta journée de labour un peu courte, tu partiras après dîner, tu seras à Fourche à la nuit , la lune est grande dans ce moment ci , les chemins sont bons, c'est près de Magnier,  tu prendra la jument, tu mettras tes habits neufs, tu portera un gibier au père Léonard, tu causera avec lui, tu passera la  journée de dimanche avec sa fille et tu reviendra avec un oui ou un  non lundi matin? C'est entendu,  répondit tranquillement Germain et pourtant il n'était pas tout a fait tranquille. Le père Maurice trouva chez lui une vieille voisine qui était venu causer avec sa femme, vous êtes venu chercher le feu du soir mère Guillette, voulez vous quelque chose d'autre, je demandais à votre femme si Germain se déciderait enfin à se remarier, Oui il part demain pour le domaine  de Fourche ; Voyez comme ça se trouve, je voudrai que Germain prit la peine d'emmener ma fille avec lui, la voilà qui prends ses seize ans elle vas partir aux Ormeaux garder des moutons c'est tout à côtés  de Fourche bien sur mon gendre  l'accompagnera. Le lendemain Marie et Germain prirent la route mais au détour d'un chemin, Germain vit dans le fossé quelque chose qu'il prit pour un agneau, c'est une bête égaré ou  morte, c'est  un enfant s'écria la petite Marie c'est votre petit Pierre, mon petit père tu vas m'emmener avec toi! Ils sont obligés devant les pleurs incessant de  le prendre avec eux; il promit de rester avec la  petite Marie le temps de sa visite à la Fourche. Ils se remirent en route  Germain connaissait le chemin  jusqu'au Magnier, mais il pensa qu'il aurait plus court en ne prenant pas l'avenue de Chanteloube, mais en descendant par  Presles  quand il entra dans le bois il se trompa si bien qu'il tournait le dos  à Fourche. Ce qui l'empêchait de s'orienter, c'était un  brouillard qui s'élevait dans la nuit, ne voyant ni descente, ni prairie, ni rivière, mais la lande unie et blanche, comme une nappe de neige, le brouillard s'épaissit encore plus, la lune fut tout à fait voilée, je crois que nous sommes ensorcelés dit Germain en s'arrêtant , car ces bois ne sont pas assez grands pour s'y perdre,à moins d'être ivre, il y a deux heures au moins que nous y tournons s'en pouvoir en sortir. La Grise n'a qu'une idée en tête , c'est de s'en retourner. Eh bien! prenons patience, Germain dit la petite Marie. Dans cette longue nuit Germain va découvrir que la petite Marie est une femme qui vas prendre soin de son fils, qui va allumer un feu comme savent le faire les enfants patour qui gardent les bêtes aux champs, au beau milieu de la pluie. L'enfant vas se réveiller et appeler Marie Maman,  Germain croit devenir fou et tomber amoureux de cette fille des champs. Marie tu me plais et je suis bien malheureux de ne pas te plaire, si tu voulais m'accepter pour mari, il n'y aurait ni beau père, ni parents, ni voisins,ni conseils qui puissent m'empêcher de me donner à toi; je ne suis pas vieux je n'ai que vingt huit ans. Mais le matin revient et ils se séparent lui à Fourche et découvre qui n'est pas le seul prétendant, elle avec son fils aux Ormeaux elle doit partir en courant s'enfuir et se cacher car le fermier veut la détrousser. Germain se retrouva bientôt à l'endroit où il avait passé la nuit au bord de la mare. Le feu fumait encore; une vieille femme ramassait le reste de la provision de bois que la petite Marie y avait entassée. Germain s'arrêta pour la questionner. elle était sourde, et, se méprenant sur ses interrogations. Oui, mon garçon, dit-elle, c'est ici la Mare au Diable. C'est un mauvais endroit, et il ne faut pas s'en approcher sans jeter trois pierres dedans de la main gauche, en faisant le signe de la croix de la main droite; ça éloigne les esprits. Si quelqu'un avait le malheur de s'arrêter ici la nuit; il serait bien sûr de ne pouvoir jamais en sortir avant le jour. Il aurait beau marcher, marcher, il pourrait faire deux cent lieues dans le bois et se retrouver toujours à la même place.